vendredi 27 mai 2011
lundi 20 avril 2009
Coquillages et crustacés II
Dans mon match contre la montre, je sors toujours perdant. J'avais prévu de vous présenter cette recette-ci à la sortie de l'hiver. Le printemps règne depuis un mois déjà. Pas l'temps, hélas ! Quelques préoccupations qui, sans me retirer le goût de cuisiner (au contraire !), me font chaque jour m'enfuir un peu plus de mon clavier. Bloguer est le cadet de mes soucis. Je suis bien trop pollué par des évènements qui toucheront dans quelques semaines des hommes et des femmes que je côtoie pour certains depuis neuf ans, un peu moins pour d'autres. La crise, hélas ! Je ne devrais peut-être pas tant me soucier de cela, me direz-vous, mais j'ai choisi il y a quelques mois de représenter mes collaborateurs. Je me dois de tout faire pour défendre les emplois de ces gens qui font partie de ma vie, même si ce ne sont que des collègues de bureau, même si je ne peux pas en encadrer certains (ouais, beaucoup même !). Et puis je ne suis pas plus assuré qu'un autre de garder mon boulot. D'ici la fin juin, nous serons fixés sur nos sorts...
Allons ! Ressaisissons-nous et regardons de plus près ce que je vous propose aujourd'hui. Parce que l'essentiel dans cette p... de vie, c'est bien notre plaisir avant tout, nan ? J'veux dire, tant qu'il y a la santé, y'a pas d'mal à se faire plaisir.
Je réitère donc mon leitmotiv du poisson poché. Entêté comme un tordu de têtu que je suis, j'ai renouvelé l'expérience en variant poissons et parfums. J'ai surtout affiné la méthode et celle qui arrive a fonctionné à merveille. L'objectif est d'atteindre la cuisson parfaite, c'est-à-dire lorsque le poisson est juste cuit, une chair encore ferme sous la fourchette mais fondante en bouche, comme une noix de beurre sur une patate chaude. Le poisson du jour (du cabillaud) a une chair si tendre, si fine, que la cuisson par pochage se fait en douceur jusqu'au cœur du morceau. Pour cela, il faut veiller à quelques règles essentielles : que le poisson soit extra frais, que la tranche n'excède pas les 150 à 200 g, qu'elle ne fasse pas plus de 2 cm d'épaisseur, qu'elle soit à température ambiante au moment de la cuisson, que le bouillon soit chaud.
Maintenant que vous voilà informés, y'a plus qu'à ! Qu'à tester ces saveurs qui, j'espère, vous transporteront au delà des mers, là où le soleil se lève, quelque part dans cette Asie qui enrichit tant notre cuisine.
Coquillages et crustacés II

Cabillaud poché au jus de palourdes et de moules de bouchot,
pois cassés & coriandre, bouillon goût citron vert,
rondelles de cèleri et épices aux cinq parfums de Chine
Ingrédients (pour 4 personnes)
2 beaux dos de cabillaud ; 16 palourdes ; 1/2 litre de moules de bouchot ; 100 g de pois cassés ; 1 bouquet de coriandre fraîche ; 1 citron vert non traité ; 1 petite branche de cèleri commun ; 8 grains de poivre du Sichuan ; 1 bâton de cannelle ; 16 graines de fenouil ; 1 étoile de badiane ; 2 clous de girofle ; fleur de sel
Marche à suivre
Faites lever deux beaux dos de cabillaud sans arête et sans peau par votre sympathique poissonnier. Dès votre retour chez vous, passez vos filets sous un filet d'eau froide, essuyez-les délicatement, coupez chaque dos en deux morceaux assez réguliers et réservez dans un plat au frais jusqu'au moment de la cuisson ou conservez-les ainsi à température ambiante, si vous avez l'intention de vous mettre tout de suite. Nettoyez et rincez également avec soin et successivement palourdes et moules dans un grand bain d'eau froide. Réservez.
Mettez les pois cassés à cuire dans de l'eau salée, selon les instructions portées sur le sachet. Comptez entre 25 et 30 minutes ; ils doivent se tenir parfaitement et fondre sur la langue. Pendant ce temps, rincez la branche de cèleri. Essuyez, épluchez et découpez-la en fines rondelles. Rincez et essuyez délicatement le bouquet de coriandre.
Préparez le bouillon. Lavez le citron vert, essuyez-le et prélevez les zestes coupés fins. Pressez le jus et versez-le avec les zestes dans une casserole contenant 100 ml d'eau. Ajoutez les rondelles de cèleri et les épices : poivre, cannelle, fenouil, anis étoilé, clous de girofle. Salez à votre convenance. Portez-le tout à ébullition, couvrez, coupez le feu et laissez infuser pendant 20 min.
Quand les pois cassés sont cuits, égouttez-les en prenant soin de conserver 50 ml de jus de cuisson que vous versez au fond de la sauteuse. Vous y mettrez à cuire, dans quelques instants, les coquillages et vous y pocherez les morceaux de cabillaud. Réservez les pois cassés.
Portez le jus de cuisson conservé des pois cassés à ébullition, baissez le feu et ajoutez les palourdes. Couvrez et maintenez la cuisson sous couvert ainsi pendant 3 min. Retirez à l'écumoir et réservez les palourdes. Mettez à cuire les moules sur le même principe pendant 3 min. Retirez et réservez. Coupez le feu et pochez enfin les morceaux de cabillaud dans ce jus de cuisson encore chaud à couvert pendant 4 à 5 minutes. Veillez à ce que le jus recouvre bien les morceaux de poisson. Si ce n'est pas le cas, retournez-les à mi-temps.
Réchauffez à feu doux le bouillon citronné et épicé en y retirant les zestes et les épices [NDLR : je préfère les conserver et les servir dans les assiettes, à l'exception du bâton de cannelle, de l'étoile de badiane et des 2 clous de girolfe], ajoutez les pois cassés et quelques brins de coriandre fraîche.
Dressez des assiettes creuses : placez 1 morceau de cabillaud au fond de chaque assiette, mettez tout autour les palourdes et les moules, versez alors le bouillon chaud sur l'ensemble et répartissez les rondelles de cèleri, les pois cassés et les épices en grain. Décorez avec quelques brins de coriandre et servez aussitôt.
Bon appétit,
mercredi 4 mars 2009
Du sakana au Sa.Qua.Na et pas que !
Le Michmich’ *, c’est en plein dans l’actu ! Ce sera l’occaz’ de vous faire part de mes premières impressions. Premières impressions du premier restaurant primo-étoilé de ma courte existence. Oui bon, pas si courte que ça, c’est que la voilà bien entamée, c’est que les 35 – trente-cinq – pointeront le bout de leur nez au cœur de l’été, c’est que… 35 ! Bordel ! Tout de même !... ’Fin, j’sais, vous vous en foutez, alors passons...

Honfleur, 1er janvier 2009. Ciel d'azur virant azote liquide. Un temps à surgeler en vol. Le thermobidule accroché à la fenêtre du nid douillet que j'ai dégoté pour nous-rien-que-nous-deux indique -8°C. Et à l'abri encore. Brrr !... Faut être fou (de bassan) pour mettre son bec dehors. Mais que voulez-vous, l'amour – Ah, l'amûûûr ! –, ça vous fait pousser des ailes, alors en deux trois petits pas chassés semi-latéraux, genre deux pies qui s'débinent avec un air Pat’hibulaire, vous voyez l'tableau, nous filons nous attabler chez Alexandre Bourdas, au Sa.Qua.Na, petite place gourmande au centre d’une place gourmande de cette à peine plus vaste place gourmande et normande.
« OMG! » ** Voilà, je crois bien, ce que je me suis exprimé à chaque service des quelques huit plats et autres petits amuse-bec dégustés lors de cette délicieuse soirée. Car le père Bourdas est doué. Et pour commencer, au menu unique du jour, vert Olive...
* Le Guide Michelin
** « Oh, My God ! »
la pascade
Une pascade Aveyronnaise à l’huile de truffe
Histoire de démarrer en douceur, sans brutaliser, une pascade réalisée dans la (presque) plus pure tradition aveyronnaise à se partager à deux-yeux-dans-les-yeux. Avec ces quelques fins cristaux de fleur de sel et de sucre parsemés comme de rien, arrosé d’un filet d’huile de truffe, je fonds comme cette crêpe fond dans ma bouche. C’est très agréable, léger sous la dent et l’eau de coing du Rouergue que je bois avec s’accorde comme un pianiste à son piano.
le cabillaud
Cabillaud poché au citron vert, feuille de livèche & coriandre,
un bouillon clair à la noix de coco & huile de Combava

Le clou du spectacle ?! déjà ?!... Lorsque l’on dépose devant nous ces bols en pierre noire de Corée, je comprends que le moment va être grandiose, peut-être le plus fort de la soirée. Je suis presque déçu, sur le coup, que cela arrive si tôt dans le déroulement des festivités, car voilà bien le plat de Bourdas dont je me gorgerais encore et encore. Au fond du bol, sur un lit de livèche (céleri) et de coriandre fraîche, un morceau de cabillaud, parsemé de zestes de citron vert râpés et d’un mélange de poudre d’épices, tout juste poché et à la cuisson absolument parfaite, autour duquel l’on verse un bouillon encore fumant qui exhale des parfums de noix de coco et de cet huile de combava que je découvre ce soir. Rien de très compliqué, vous voyez, juste ce qu’il faut là où il faut : des Saveurs d’une Qualité irréprochable qui, sans artifice aucun, nous rappelle parfois comme la Nature est bien faite. Sa.Qua.Na. Saveurs, Qualité, Nature. C’est équilibré comme un funambule sur son fil.
la daurade
Un filet de daurade étuvée, rétiche & navets,
vinaigrette au beurre noisette, kabossu – cardamome

J’ai à peine le temps de me remettre du cabillaud archi-fondant, que l’on apporte un morceau de daurade cuit à l’étuvée. Une fois de plus, cuisson parfaite. Avec cela, de fines tranches de navets, blanches et douces comme un Demak’Up, et pourtant je ne suis pas un adepte des navets. Et cette vinaigrette : incroyable ! Peut-être un rien trop sage pour qui aime que la vinaigrette fouette le palais. Mais pour cela, il faut compter sur le talent du chef-cuistot Bourdas, qui additionne le kabossu à la cardamome pour donner la petite claque palatale tant attendue. Et quelle maîtrise de l’équilibre, quelle finesse dans l’assiette ! C’est assez jouissif, je l’avoue. Et si l’on ajoute par-dessus cela une petite gourmandise joliment vinifiée, un Montlouis-sur-Loire sec de Jacky Blot, moi, j’applaudis des deux mains.
les coques
Des pommes de terres "Coufides" au gras,
quelques coques du Cotentin - jus de poulet rôti & persil

Nous nous éloignons petit à petit de la côte et pénétrons plus à l’intérieur des terres. Grâce aux coques, la mer n’est pas très loin encore. En deux ou trois coups d’aile (de poulet... rôti), nous survolerions la Manche. Bourdas se refuse à briser d’un cul sec le cordon lombilical (Mon dieu, Pat’, sors de ce corps !) qui le rattache au littoral. De facture plus classique, ce plat satisfait pleinement une fois encore notre gourmandise. Je redécouvre la saveur oubliée chez moi des coques. Cette pomme de terre confite se laisserait presque manger comme un bonbon... sans risque de carie aucune ! J’aurais dû prendre une photo d’après dégustation, j’ai outrageusement saucé mon assiette avec le pain maison à la mie tendre et à la croûte craquante à souhait, jusqu’à faire disparaître la moindre trace de ce jus de poulet rôti.
Le caneton
la poitrine de Caneton rôti, condiments coing,
cerfeuil tubéreux, jus et bouillon rance juste moussé

Bienvenue à la ferme ! Canards et pigeons ont remplacés cormorans et mouettes rieuses. L’on entendrait presque japper le chien de chasse devant la porte, chanter le coq sur le tas de fumier, meugler la vache à lait dans l’étable qui appelle à la traîte, tellement que ce plat-là est bon ! Nous ne sommes plus en 2009, mais un siècle plus tôt : caneton – pour un jour de fête – et légumes tubéreux, jus de jambon et compotée aigre-douce de coing. Décidément, Bourdas excelle dans la justesse de ses cuissons. Et puisque ma délicieuse bouteille de Montlouis coule depuis un petit moment déjà dans mes veines (Jacky ! Jacky Blot ! Si tu m’entends, si tu me lis – Bah quoi ?! On peut rêver, nan ? –, je t’en prie, dis-moi où je peux dégoter quelques unes de tes bouteilles, Grand Dieu !), je m’offre un grand verre (format XXL à ras bord, tout de même ; l’on voulait vraiment que je rentre fin ivre, faut croire) de Bordeaux. Fabuleux, of course !… avec le caneton et tout ça...
le plateau de fromages
sélection de Fromages Normands & Aveyronnais
« Pause » frometon. C’est que je n’en puis déjà plus, mais peu importe, le plateau est magnifique et je dévore à la fourchette un petit morceau de chaque... avec le verre de Bordeaux... Plaisir, plaisir...
Pruneaux à l’armagnac, mousse légère, sablé& breton au café & yuzu

C’est à ce moment là que je me suis dit que j’étais rien qu’un vicieux gourmand. Je n’aurais peut-être pas dû manger tout ce pain. Mais que voulez-vous : pain frais et beurre de baratte cru demi-sel, telle est ma madeleine de Proust. Bref, l’on m’apporte ce ludique « yuzu ». J’admire et je goûte. Une vague de sucre et de saveurs déferle dans ma bouche. C’est délicieux, c’est certain, toutefois bien trop sucré à ce moment précis du repas : avec des pruneaux, quelque part, on ne saurait moins l’être. Rien de désagréable, entendez bien, mais je ne suis pas moi-même un adepte de la petite prune séchée. J’apprécie l’impeccable croquant du sablé sous la couche humide des pruneaux macérés, la légèreté de la mousse et l’association subtile pruneau/armagnac/yuzu.
la truffe Mélanosporum
Une feuille de nougatine cacao, chocolat blanc
et truffe « Mélanosporum », crème de châtaignes grillées

La revoilà : la truffe ! Mais nous en sommes bien aux desserts, n'est-ce pas ?!... La truffe ouvre et ferme le bal. La boucle est bouclée. Elle vous rappelle qu’il est bientôt l’heure de partir… ou d’y revenir de si tôt. C’est qu’il est malin Alexandre Bourdas. J’aime cet effet miroir truffé-sucré-salé. Encore ici un très bel exemple d’équilibre.
...pour finir et pour grignoter
la mandarine, le café & le matcha
Mousse à l’huile d’olive & pamplemousse – biscuit brûlé – Mandarine de Mikan
Un Sorbet ananas, croquants noisettes & chantilly à l’eau
Un pain de gênes au Matcha – crème passion & confiture de groseilles

Peut-être parce que j’étais rassasié, c’est de loin la partie la moins intéressante de la soirée. J’oublie la mousse à l’huile d’olive et pamplemousse qui ne me convainc pas le moins du monde, je constate amèrement que le biscuit n’a précisément de goût que le brûlé de son intitulé, je me dis que la mandarine de Mikan n’a de beau que le nom et que la seule chose appréciable, renseignements pris, est que cette mandarine est traditionnellement servie en Europe au moment des festivités de fin d’année. Pile-plume dans l’mille ! Par contre, par contre !... Par contre, le sorbet ananas est une véritable merveille et, une fois n’est pas coutume, je ne cours pas après le nana nana. La chantilly à l’eau qui l’accompagne est assez sidérante. Je retiendrais encore le bel effort de ce pain de gênes au thé matcha (un peu sec, je trouve), et le petit clin d’œil final de la crème passion.
Voilà, je crois que j’ai tout dit. Ah non, quelques infos encore et je file au dodo pendant que vous, vous filez illico presto au resto !...
22 place Hamelin 14600 Honfleur
Téléphone : +33 (0)2.31.89.40.80
Courriel : saquana(at)alexandre-bourdas(point)com
Important : Les réservations ne sont prises et enregistrées que par téléphone.
Ouvert tous les soirs du vendredi au mardi plus les déjeuners du week-end.
Fermeture hebdomadaire : mercredi & jeudi
http://www.alexandre-bourdas.com/saquana/index.htm
Bon appétit,
jeudi 14 février 2008
Ti zwézo en Ma’tinique* ou la nuit d'amour
(* L’oiseau en Martinique)
Cric ! Crac ! Quittons la Métropole où grouillent ces vilains métro et en nou mèt lé vwal koté Ma’tinique !
Cric ! Crac ! Je laisse mon plumage de gros dindon qui ronge son frein dans la capitale et je me transforme en un joli Tit'iri, qui le premier entonne sa ritournelle d’amour chaque matin quand tous dorment encore.
Cric ! Crac ! J’vous raconte des craques, j’suis pas parti me dorer la pilule sous les tropiques, ce serait trooooop beau, naaaaan, c’est rien qu’une blagounette entre collègues, comme qui dirait : sa ka fè di bien dè révé dè tanzantan !
Cric ! Crac ! Point de blablatage sans foin ni fondement, point de tergiversation intempestive, allons à l’essentiel, allons au cœur du cœur du problème qui nous occupe : bon mangé-la ou comment concocter en quelques gestes extrêmement simples l’une des plus belles recettes des Antilles.
Blaff tout doux de poiscaille sans écaille pour une nuit d’amour
I fo pou 4 moun :
4 darnes de poisson à chair blanche, tendre et fondante ; 2 citrons verts ; ½ zeste d’orange ; 4 clous de girofle ; 4 grains de poivre vert ; 1 litre d’eau ; 1 gousse d’ail ; 2 oignons ; 1 pincée de cannelle ; persil ; thym ; fleur de sel et poivre noir
Marche à suivre
J-2 : Je me connecte à Lastcocotteminute.com. Je dégote au plus tôt une place d’avion en partance pour la Martinique, en classe éco de préférence, histoire d’avoir encore quelques capitaux une fois sur place pour investir dans du matériel de pêche haut de gamme. Pas la peine de me charger. J’emporte le strict minimum : une paire de jeans pour le voyage, une ou deux culottes propres (c’est mieux et puis au besoin, je laverai sur place, avec la chaleur, ça sèche bien mieux que ma lavante-séchante Milleu), une paire de chaussettes uniquement pour ne pas geler des petons au retour en métropole, une chemisette colorée mais pas moche (on évitera la chemise version Antoine dans les atolls, parce que ça craint du boudin...), mes Havaianas de prédilection (on est fashion ou on ne l’est pas !), un gros pull (pour le retour bis), et pis surtout mon matos de plongée, masque, tuba, palme et maillot de bain. Pas la peine d’investir, je réutilise mon vieux maillot Quechua acheté l’été dernier pour mes vacances au Camping Les Flots Bleus*** à Saint-Tripouille-L’Océan. Je laisse mes produits de soin : ça voyage pas dans l’avion et pis, lavé ou pas lavé, je sentirai le fishy-fish un point c’est tout !
J-1 : Je me réveille, je me réveille, j’ai un avion à prendre, faut pas l’louper !... Kwa sa ?! Tanguy et Laverdure font grève ?! Les s*** ! Les ordures ! Les *** !
Jour J : J’sais pas comment j’ai fait, mais voilà que je me réveille tout à coup sur le tarmac de Fort-de-France en Ma’tinique. Tant pis si je souffre du décalage horaire, tant pis si la chaleur m’accable tout à coup à la descente de l’avion, y’a pas tan, je file dès mon arrivée acheter et monter mon matériel de pêche. Puis, je pars à la recherche d’un bateau, d’un canot, d’une barquette, peu importe, que je mènerai tant bien que mal à la rame là-bas, plus loin, au large, après les rouleaux qui s’abattent sur cette magnifique plage de sable blanc entourée de cocotiers où je marchais à l’instant. Pour parvenir à mes fins, c’est simple comme bonjou, je ne compte que sur ma bonne étoile et sur mon charme fou et je séduis une belle îlienne aux courbes généreuses et à la peau si délic(hocol)ate, jusqu’à ce qu’elle accepte de me prêter son navire contre la promesse d’un bon repas cuisiné par mes mains expertes.
Une fois en pleine mer, j’appâte le poisson : je lui chante une chanson douce que me chantait ma manman, je lui chante la mè, ses reflets d’argents sous la pluie dans ses golfes clairs, je lui chante l’amour, l’amour, l’amour, je lui chante tout ce que je veux pourvu que ça marche, pourvu que je le pêche, le poisson, et à la ligne de préférence ; j’évite ainsi les rets éradicateurs de Flipper and Co. Moi, je les aime bien les dauphins, et pis c’est romantique, alors pas touch’ !
Le poisson attrapé, je reviens vite sur la plage – avant la nuit tombée, surtout, car il serait dommage de finir dans la goule affamée d’un requin marteau… enfin, pas plus marteau que moi qui ai fait tant de kilomètres pour de si petits poissons, mais bon… ce n’est qu’une question de point de vue, hein ! – car ma doudou prêteuse qui me mate aux jumelles depuis le matin, depuis la plage, de peur que je me barre avec son affreux rafiot percé sans lui apporter pitance, commence à trépigner sévèrement sur le sable et jure qu’elle me fera zouké à sa manière, un gourdin de bois vert à peine dissimulé dans la main, si je ne me magne pas mon gros tchou plumé !
Dans la cahute de ma beauté tropicale, je prépare le poisson. Je demande à ma belle îlienne un petit coup de main, elle le fera avec mil plési. Cuisiner à quatre mains, c’est plus... comment dire ?... plus mieux ! J’évite cependant de rejouer pour la énième fois la scène du potier version Ghost car, avec du poisson, c’est franchement pas ce qu’il y a de plus... sexy.
Venons-en (enfin !) au fait... Comment préparer ce blaff ?
Laver le poisson, écailler sa peau si tendre. Avec un couteau à larder, ouvrir le poisson et l’évider. Les âmes sensibles auront demandé à leur poissonnier unique et préféré de s’en charger, mais moi, moi qui suis amoureux, j’suis un battant, j’ai traversé les mers et les océans pour en arriver là, alors j’vais pas flancher si prêt du but, alors rien ne me fait peur, alors j’ouvre, alors j’évide et... GLOUPS !... je prends soin de découper le poisson en darnes de 3 à 5 cm d’épaisseur. Rincer ensuite le poisson à l’eau claire et l’essuyer avec du papier absorbant. Réserver.
Préparer le bouillon. Dans une casserole, mélanger 1 litre d’eau avec les clous de girofle, le poivre vert, la cannelle, le thym, les oignons coupés en rondelles. Mettre à chauffer le boucan sous le bouillon et porter à ébullition. Laisser bouillir 30 min. Poivrer généreusement et saler à son goût.
Préchauffer le four à 210°C. Prélever les zestes d'orange. Déposer les darnes de poisson dans un grand plat en terre allant au four. Frotter généreusement le poisson avec un citron vert. Parsemer de zestes d'orange. Arroser avec le court-bouillon épicé non filtré. Enfourner pendant 15 à 20 min. En fin de cuisson, ajouter le jus du second citron, le persil lavé et ciselé et la gousse d'ail écrasée.
Servir immédiatement les darnes de poisson arrosées avec le bouillon parfumé. Accompagner avec du riz créole et des rondelles de banane plantain frites.
Et maintenant, à table !...
J’ai pris soin de créer une ambiance de rêve, romantique à souhait, sous la lumière de mille chandelles et torches plantées dans le sable, dont les flammes se balancent doucement sous le vent chaud qui nous enveloppe. J’attends, excité comme une puce sur le dos d’un chien, que ma belle îlienne se prépare pour notre première nuit d’amour pour ce premier rendez-vous galant. Après un ti zouk endiablé, après un ti sèk ou deux (ou trois, je sais plus bien, c'est traître ces trucs-là), nos estomacs crient famine, j’invite ma douce à passer à table et j’apporte le blaff encore fumant.
« 'Tention, doudou mwen, bagail la cho, cho, cho ! »
Ma belle nègzagonal porte une cuillérée à sa bouche et souffle et souffle et souffle. Elle l’engloutit, ferme les yeux et mâche délicatement. Je n’entends plus que ses bruits de succion, le souffle léger du vent dans les cocotiers, le disque de zouk qui se tait peu à peu comme pour lui laisser la parole. Je suis sur le qui-vive à guetter la moindre réaction. Elle rouvre des yeux plein de mille étoiles et dit :
« Hmmm ! Doudou, i bon memm ! »
« Vrai ? »
« Vrai, doudou mwen. On dirait celui de manman. »
Je suis aux anges !
Elle se lève, lascive, glisse vers moi, attrape mon visage pas rasé pas lavé entre ses deux mains douces qui sentent si bon la coco et dépose sur mes lèvres tremblantes un gros ti-bo plein d’amour et là, mwen, paf, je tombe dans les corossol !
« Eh, ti z’oreilles, sa ka maché ? »
« Euh… Mwen bien, mwen bien, pani problèm, doudou mwen ! »
Elle me sourit et dépose un nouveau ti-bo, puis un autre, un autre sur mes joues, mes oreilles, m’embrasse la moindre surface de peau. Je me sens défaillir, mon œil une fois de plus s’en retourne dire merde à l’autre, avant de rouler dans son orbite et que je m’écroule le nez dans la gamelle.
Pif ! Paf ! On me réveille, on m’agite. Ma belle amante me secoue comme un cocotier :
« Reviens à toi, ohlala, doudou, tiembè raid pas moli ! Vini pran an ti sèk-sèk, ça ira mieux après ! »
Pif ! Paf ! Aïe ! La belle image de ma doudou s’efface tout à coup, il fait tout noir, j’ai froid, p*** de rhum, il me monte au cervelet. Pif ! Paf ! Aïeuh ! Merdeuh ! Quoi encore ! Ce n’est plus la douce lumière des chandelles qui m’éclaire mais une lumière froide et électrique qui m’explose les pupilles. Elle est là, face à moi, folle de rage, sa mèche brune en bataille, sa main preste et leste prête à s’abattre une nouvelle fois sur mes joues endolories. Qui ? Non pas la nègzagonal qui hante mon rêve, mais ma doudou-zwézo à moi depuis quatorze ans, ma belle oiselle, mon épouse depuis bientôt dix ans, ma Nat’ à moi.
« MAIS !... MAIS !... Mais t’es complètement barré, mon pauvre, ça va pas chez toi desfois ! Il est quatre heures du mat, on se lève dans moins de deux heures, qu’est-ce que tu crois, que je vais réussir à dormir avec un type qui s’agite, qui ronchonne, qui crie, qui me saute dessus comme un sauvage en pleine nuit ?!... »
Vite, se réveiller, se secouer, réagir, trouver une parade, ne pas laisser la colère l’envahir, sinon je me retrouve sur le pallier à poil dans deux minutes.
« Euh... Ma belle, ma douce, ma tendre, Mon Unique, je... euh... Je suis désolé, je rêvais. Je rêvais de toi, ma belle, ma douce, ma tendre, Mon Unique, de toi et de tout le bonheur que j’éprouve chaque jour à tes côtés. Je... euh... »
Tout à coup, une idée de génie, z’allez voir, j’ouvre la table de nuit où je dissimule les cadeaux et j’en sors le paquet que je lui réservais. Je le lui tends, elle s’adoucit, émue, émue de fatigue peut-être, mais émue aux larmes tout de même, ce qui n'est pas rien, comprenant que je n’avais pas oublié... pas oublié, cette année.
« Bonne Saint Valentin, ma chérie ! »
jeudi 15 mars 2007
Cotriade du Petit Port
Eté 1997. Les quelques jours que je passe sur la Presqu'île de Crozon sont pour moi un retour aux sources, un agréable bain de jouvence. Je découvre à nouveau les plages et les paysages de mon enfance (l'Aber, Saint Hernot, Camaret, Morgat) et j'entraîne ma tendre (et future) dans mon sillage. Libres comme l'air, nous vivons à notre rythme, nous nous levons comme bon nous semble, nous déjeunons pendant des heures, nous piquons un somme à l'heure de la sieste, évitant ainsi les heures chaudes de l'après-midi, puis nous partons à la plage à vélo pour rentrer par les chemins de terre entre chien et loup. Pas d'enfant, plein d'amour, encore étudiants, c'est-à-dire les poches vides, le coeur léger et amoureux, c'était... le pied !
Quand je vois la vie de fou que nous menons - et que vous menez très certainement - comment ne pas être un peu nostalgique de ces quelques semaines de paix véritable ! Aujourd'hui, même les vacances demandent une organisation militaire et une préparation psychologique du tonnerre avant le départ.
Mais revenons à cet été 1997...
Malgré nos pauvres moyens, nous nous offrons un repas de roi dans un bon restaurant de la Presqu'île. Situé à deux pas de notre location, en plein centre de Crozon, le restaurant gastronomique de Joël et Jocelyne Euzen, le Mutin Gourmand, se trouve légèrement en retrait sur la place de l'église. Je garde de ce moment passé dans la salle au décor confiné un très agréable souvenir. Je me souviens surtout de la découverte que j'y fis en me délectant d'une fabuleuse cotriade.
La cotriade est une soupe de poisson consommée sur la majeure partie du littoral breton. Cuite souvent à même le quai, cette soupe étaient essentiellement constituée, jadis, des poissons communs dont l'on ne voulait pas (les cons !) quand les poissons les plus nobles (soles, turbots, etc.) étaient réservés à la vente et à la haute gastronomie. La cotriade, plat de marin s'il en est, était constituée de poissons communs non parés, de beurre ½ sel (ou de saindoux), d'oignons, de pommes de terre. Aujourd'hui, on y ajoute des légumes frais.
La cotriade que j'ai concocté avec amour ce week-end ne déroge pas à la règle : poissons "communs" (maquereau, cabillaud, dorade), beurre demi-sel, pomme de terre. J'ai ajouté des moules de bouchot pour le fumet, des herbes fraîches, des pousses d'épinard, des carottes, des poireaux, du fenouil, etc.
Bon ? Non. Fameux, oui !
Carnet d'adresse : Le Mutin Gourmand – Place de l'Eglise 29160 Crozon
Fermé le mardi midi, le dimanche soir et lundi hors saison, sauf le lundi soir en juillet et août.

Cotriade du petit port
Ingrédients (pour 4 personnes gourmandes)
500 g de moule de bouchot | 1 maquereau |
1 dorade grise | 1 darne de cabillaud |
1 rouget(*) | 2-3 poireaux |
2-3 carottes | 2-3 pommes de terre à chair ferme |
2-3 oignons grelot | 1 oignon rouge de Roscoff |
1 gousse d'ail écrasée | 1 bouquet garni |
100 g de pousses d'épinard | 25 cl de vin blanc Entre-deux-mers |
50 g de beurre demi-sel | 750 ml d'eau (ou de fumet de poisson) |
Marche à suivre
Nettoyez les poireaux et coupez-les en lamelles fines. Ciselez les oignons. Epluchez les pommes de terre et les carottes, coupez-les en morceaux grossiers. Lavez et grattez les moules dans un grand bain d'eau fraîche. Rincez et essorez les poissons sur du papier absorbant.
Lorsque les légumes sont cuits, retirez-les et réservez-les au chaud. Mettez les poissons à cuire à court-bouillon pendant 10 minutes. Retirer les poissons délicatement et réservez-les également au chaud. Mettez à cuire les moules dans le bouillon jusqu'à ce qu'elles s'ouvrent.
Pour le service, disposez les légumes dans le fond d'un grand plat en terre. Disposez les poissons, les moules et arrosez avec le bouillon. Servez la cotriade avec de grande tranches de pain de campagne beurrée ou aillée.
Bon appétit !
(* Pas de rouget dans ma recette. Trop d'arrêtes pour mes oisillons. Quelque mauvais souvenir d'un séjour aux urgences...)
lundi 19 septembre 2005
Merlu et légumes en papillotes, spaghetti et pesto
Rien de mieux qu'un bon petit repas, réalisé sans prétention aucune avec les envies du jour et les moyens du bord, qui plaît aux petits et aux grands, comme ce coeur de filet de merlu cuit en papillote et accompagné de spaghetti simplement cuisinés.
Merlu et légumes en papillotes, spaghetti et pesto
Ingrédients (pour 4 personnes)
4 filets de merlu | 20 moules de bouchot |
4 tomates cerises | 4 fleurs de brocolis |
4 rattes de Noirmoutier | 1 blanc de poireaux |
4 CS de cidre brut | 5 filets d'huile d'olives |
1 échalotte | herbes |
250 g de spaghetti de semoule de blé | 250 g de spaghetti quinoa/persi/ail |
1 poignée de roquette fraîche | 1 bouquet de basilic |
100 g de pignons de pin | 1 gousse d'ail |
2 CS de parmesan râpé | 2 CS de crème fraiche (fac.) |
sel, poivre |
Marche à suivre
Préchauffer le four à 210°C.
Découper quatre carrés de papier alu. Dans chaque feuille, disposer au centre, un filet de merlu, 5 moules, 2 moitiés de tomate cerise, 1/4 du blanc de poireau découpé en fines rondelles, 1 fleur de brocoli, 2 moitiés de ratte, un peu d'échalotte émincée, les herbes. Saler, poivrer. Arroser avec 1 CS de cidre et 1 filet d'huile d'olives. Rabattre les bords de la feuille d'aluminium pour rendre hermétique la papillote. Glisser au four 20-25 min.
Cuire les spaghetti très al dente, en fonction du temps de cuisson estimé sur les paquets (5-7 min). Pendant ce temps, hacher au robot la roquette, le basilic et l'ail. Mixer les pignons de pin.
Mélanger les herbes hachées, les pignons hachés, l'huile d'olives, et le parmesan.
Quand les pâtes sont cuites, les égouter, les passer à l'eau froide pour arrêter la cuisson.
Dans la casserole de cuisson, cuire à feu doux le pesto, jusqu'à coloration des herbes. Puis mélanger avec la crème fraiche. Ajouter les spaghetti. Mélanger et réchauffer doucement. Saler, poivrer.
Sortir les papillotes du four et les ouvrir sans se brûler. Récupérer le jus de poisson et mélanger aux pâtes. Présenter le poisson avec ses petits légumes et accompagné de pâtes chaudes.
Bon appétit,