vendredi 25 avril 2008

Parce que les oranges, j'aime bien ça

Parce que les oranges, j'aime bien ça. Pas pressées, on l'est assez soi-même en ce moment à ne pas avoir une minute à soi. Non, les oranges, je les aime comme ça. Fraîches et juteuses. Je les préfère souvent aux clémentines, aux pamplemousses, aux mandarines. Et pis, je sais pas, ça remonte à l'enfance, aux noëls de quand j'étais à peine haut comme... trois oranges ! A côté du cadeau joliment emballé, y'avait les années clémentines, les années mandarines, y'avait les années orange - tiens, et l'plamplemousse ?! - et c'était toujours ces dernières que je préférais, parce qu'avec l'orange, y'avait du chocolat, y'avait aussi du chocolat avec les clémentines, avec les mandarines, mais allez savoir, j'aimais mieux le mariage du chocolat avec l'orange, question de goût, de sensibilité du palais.

Et pis l'orange a disparu du fond de mon chausson, j'avais grandi, j'avais compris que le Père Noël et tout ça, tralala, l'orange coûtait aussi de moins en moins cher, la clémentine lui emboîtait le pas, la mandarine, le pamplemousse, le blanc, le bien acide, l'immangeable, celui que Mémé Phine défendait toujours, "Vas, mange, c'est bon, c'est acide, c'est que des vitamines, c'est que de la bonne mine, mange, fais pas la grimace, on dirait un singe, voilà du sucre et mange !", disparaissaient des étales pour réapparaître des années plus tard, plus chers, très chers, le double, le triple, allez savoir pourquoi, l'économie de marché sans doute, la mondialisation, une connerie du genre qui fait qu'aujourd'hui l'indien n'a plus de riz, le kenyan plus de manioc, qui fait que je pourrais rouler à l'huile Végétaline si je voulais. Tout ça pour dire, oui, l'orange coûtait moins cher tout à coup, elle était plus fréquente sur le marché, moins bonne, comme par hasard, mais encore meilleure que les clémentines qui perdaient leur âme en oubliant leur goût. De l'orange aussi, j'ai oublié le goût. Y'en avait chez nous, pas tout le temps mais souvent, à pourrir dans le panier, parce qu'elle avait perdu son ascendance sur moi. T'avais beau être belle l'orange, ronde comme la Terre, la terre qui est "bleue comme une orange" disait le poète, je ne te voyais plus, je ne te sentais plus, je détestais même l'idée de t'éplucher, parce que ta peau était cireuse, crasse, on aurait dit un mannequin pendant une défilé de haute-couture.

Et pis un jour, j'sais pas pourquoi, j'ai eu une envie de femme enceinte, alors que j'étais pas enceint parce que je suis un homme... un oiseau ! Une envie furieuse, comme une envie de pipi qu'on peut pas soulager (encore un truc de fille... Tenez, faudrait que j'analyse tout ça, ça devient inquiétant...), mais qu'on peut soulager quand même, suffisait juste de sécher une fois de plus le désastreux cours d'allemand de Herr Gemander. Bref, je savais qu'il y avait marché ce jour là, j'avais songé à une orange et n'avais pu oublié cette idée de toute la matinée, alors quand onze heures a sonné, je me faufilais à l'extérieur incognito et je courais trouver les plus belles oranges qui soient. Je trouvais et courais dans l'autre sens, mon sac à dos rempli de 30 francs d'oranges - toute ma richesse ! - et je m'empiffrais égoïstement dans la pénombre à m'en faire péter la panse.

Et depuis, je mange à nouveau des oranges régulièrement, plutôt quand l'envie me prend que systématiquement malgré le bon conseil de ma Mémé Phine : "Vas, c'est que de la bonne mine !"


Une petite recette simpliste pour digérer ?

Orange en gelée de fleur d'oranger

Ingrédients (pour 4 personnes)

5 oranges juteuses à souhait non traitées ; 2 cuillères à soupe de fleur d'oranger ; 2 cuillères à soupe de sucre en poudre ; 1 cuillère à soupe de Grand-Marnier (fac.) ; 1 pincée d'agar-agar

Marche à suivre

Lavez et essuyez les oranges. Prélevez le zeste d'une orange, puis pressez-la. Epluchez les quatre autres oranges à vif, en prenant soin de retirer le duvet blanc et de récupérer le maximum de jus. Coupez en quartier, sans peau et placez au fond des ramequins. Dans une casserole, portez à ébullition le jus d'orange, le sucre, le Grand-Marnier (fac.) et les zestes détaillées en fines lamelles pendant 5 minutes. Ajoutez l'agar-agar, laissez bouillir quelques secondes, puis interrompez le processus de cuisson. Ajoutez la fleur d'oranger, mélangez. Versez sur les quartiers d'orange dans des ramequins et laissez prendre à température ambiante, puis au frais. Servez très frais avec des biscuits.

Bon appétit,
Tit'