samedi 15 novembre 2008

Fromage frais aux algues

Nous éprouvons tous une énorme satisfaction quand nous réussissons ce que nous entreprenons de nous-mêmes avec nos petites papattes plus ou moins habiles : qui de la bricole, qui de la cuisine, qui de tout autre chose et peu importe. Enfant, j’avais assisté avec mes cop’s d’école à une exposition sur les produits laitiers. Goulu de from’tons dès le berceau, je m’étais particulièrement régalé ; la maîtresse s’en était d’ailleurs fort inquiétée, pensant que je rendrais ma gourmandise dans le car qui nous ramenait à Maurice Genevoix. Il n’en fut rien. J’avais notamment apprécié deux moments mémorables qui avaient été la réalisation en direct d’une motte de beurre demi-sel dans une baratte en bois (pour quelle raison croyez-vous que j’en raffole, même si je suis né dedans ou quasi ?) et la concoction d’un fromage au goût tout doux que la gentille madame – qui avait des seins si exorbitants que je m’en rappelle encore aujourd’hui, si énormes vous dis-je que je crois bien que nous fûmes quelques malins à nous imaginer que le lait, qu’elle brassait avec son énorme écumoire dans la cocotte, avait été extrait de sa poitrine volumino-généreuse –, que la gentille madame, disais-je, qui l’avait préparé avait appelé « ricotta ». Ainsi donc, on pouvait faire son fromage soi-même !

Pourquoi ai-je attendu toutes ces années pour m’y mettre ? Je l’ignore bien. Il aura fallu que je croise dans le métro une femme dont la silhouette fellinienne ne m’apparaissait pas inconnue, avec une paire de seins qui pointait vers le Pont de l’Alma et une paire de fesses qui indiquaient la direction inverse vers la Gare d’Austerlitz, pour que ce stimulus me rappelle cette journée heureuse, vingt-cinq ans plus tôt, où je découvrais que l’on pouvait réaliser du fromage à la maison avec peu de moyen et une « magu’nifique poïtrine », comme dirait Dany Boon. Oui, j’en ai bien conscience, cette résurgence soudaine dans ma mémoire d’oiseau défraîchi, c’est un rien tordu. Mais, il me semble que vous êtes déjà bien au courant de ce que peut être mon état normal : l’oiseau, c’est bien connu, a une sacrée araignée au plafond !


J’ai donc attendu toute ces années pour avoir le plaisir de m’écrier soudain, à la façon d’une Valérie Lemercier toute fringante et pimpante, avec des plumes en plus sur le torse cependant : « Vous aimez ? C’est moi qui l’ai fait ! ». Bien sûr, en oiseau pas très sérieux que je suis, j’ai réalisé un fromage encore moins sérieux. Après avoir testé une version nature plutôt convaincante, il a fallu que j’en rajoute. De l’ail et des fines herbes, ah oui, volontiers ! Hélas, point de fines herbes, ou très peu, et encore moins d’ail dans la demeure à l’heure où je concoctais ma ricotta maison, une heure indue pour espérer en dégoter dans quelque commerce que ce soit. Je me contentais donc de ce que je trouvais dans mes placards. J’ai bien failli faire une ricotta au curry, mais j’ai cru un instant que ce serait abuser de la tolérance gustative des miens, déjà bien élimée après des mois de tests laborieux et parfois des plus curieux en cuisine. Ma leste main tombait au fond du placard à épices sur un pot dont la date limite de conservation arrivait à son terme et qui contenait des paillettes d’algues marines déshydratées made in ma bro de mon cœur. Et aussitôt, voici que je mélangeais au caillé qui était en train d’apparaître à la surface de la casserole, une belle cuillère de ces paillettes auxquelles j’ajoutais un rien de ciboulette, une touche de persil et quelques brisures de romarin trouvés au fond du congélo. Et ainsi naquit ce fromage frais aux algues dont je me régalais et que j’emportais à la séance photo que nous proposait Isabelle Rozenbaum pour l’immortaliser à tout jamais.

Le gôut de ce heu... fromage ? Une bien étrange sensation, je l’avoue. Au départ, je n’étais pas fan. Puis j’y suis revenu, par petites touches, pendant un jour ou deux, comme attiré par le souvenir entêtant que me laissait ce fromage sur le palais. Enfin, je finis par lui faire sa fête, étalé en couche épaisse sur une tartine de pain de campagne, avec dans l’assiette une belle salade de roquette, des tomates bien goûteuses et des crevettes sautées à l’ail. J’avais trouvé comment le déguster !


Fromage frais aux algues

Ingrédients

1 litre de lait frais cru entier ; 5 g de sel fin ; 2 CS de jus de citron pressé ; 2 CS de paillettes d’algues déshydratées ; 5 tours de moulin à poivre noir ; et « un rien de ciboulette, une touche de persil et quelques brisures de romarin »

Marche à suivre

Avant de vous lancez, achetez au préalable des compresses stériles de gaz hydrophile de 30x30, pour filtrer le caillé. Si vous avez une mousseline, c’est tout aussi bien. Munissez-vous encore de fil de cuisine pour suspendre le fromage, qui doit s’égoutter plusieurs heures.

On y va ? Vous verrez, c’est on ne peut plus simple !

Mettez le lait dans une casserole et portez-le à ébullition. En dehors du feu, ajoutez le sel et le jus de citron pressé. Remettez la casserole sur le feu baissé et laissez cuire à petits frémissements entre 10 et 15 minutes. Lorsque le caillé remonte à la surface (en petits grains à peine plus gros que de la graine de couscous), ajoutez les algues et les herbes ciselées. Garnissez une passoire avec deux bandes de gaz stérile que vous laissez pendre de part et d’autre de la passoire. Prélevez les morceaux de caillé, qui ont dû commencer à s’amalgamer les uns les autres, avec une écumoire ou versez délicatement le tout à travers la passoire. Nouez les coins des compresses entre eux avec du fil de cuisine et suspendez le fromage au-dessus d’un plat ou de l’évier. Laissez égoutter pendant 2 à 3 heures. Sortez le fromage, posez-le sur une assiette, puis mettez au frais pendant une heure ou deux avant de le consommer.

Pour obtenir un fromage frais moulé : si vous possédez une ancienne faisselle (généralement en terre cuite ou en alu inoxydable), placez une compresse ou une mousseline au fond de la faisselle et laissez égoutter le fromage le temps indiqué ; si vous ne possédez pas de faisselle, un conseil, lors d’un prochain achat, achetez de la faisselle ou du brousse en pot chez votre fromager ou en supermarché et conservez les moules plastiques à rainures. Ils résistent assez bien à la chaleur.

Bon appétit,
Tit'

20 graines et quelques miettes pour un cuicui affamé:

sans algues pour moi, tu penses ;)
mais bravo pour le tour de main !

Anonyme , le 15/11/2008 12:46  

ça c'est du paneer, le fromage frais se fait avec de la présure, mais le coup des algues, je note, ces végétaux, j'adore ça.

mamapasta , le 15/11/2008 17:39  

Faire sa ricotta, voilà qui me titille depuis un moment..; avec des algues, je ne saispas mais la faire oui... l'idéal serait d'avoir du lait de brebis... dur, ici mais je vais quand mêmeme renseigner!
Que de référence chez toi... fellini et Valérie Lemercier mariés à Dany Boon, c'est un festival!
Bisous de bon week-end.

Mamina , le 15/11/2008 19:17  

Le fromage, je te suis, tu penses, mais les algues ... Ca doit être mes origines auvergnates. Les algues ne passent pas le frontière.

Anonyme , le 15/11/2008 22:57  

sympa le coup des algues!

Anonyme , le 16/11/2008 15:09  

Trop la classe la vie à la campagne ! Mais je ne comprends pas bien, où est donc le four ? ;-)

Sophie François , le 16/11/2008 16:48  

Comme je me souviens de ce fromage! Il m'avait littérallement "tapé" dans l'oeil à la manière des seins felliniens de ta laitière! à chacun ses fantasmes...

Anonyme , le 16/11/2008 18:35  

ben voilà, de beaux seins et ça fait son fromage soi même! elle est belle la morale de l'histoire! en tous les cas je suis fort aise que tu n'aies point trouvé d'ail, et opté pour le curry, s'il en eut été autrement, je n'aurais point été aussi charmée, mécréant!

Alhya , le 16/11/2008 22:36  

mais c'est du paneer indien avec une touch' de Tit que tu nous a fait là !

LILIBOX , le 17/11/2008 08:52  

C'est donc toi que j'ai croisé dans le métro ce jour-là? ;-D
Non, je suis loin de ressembler à cette inconnue croisée dans le métro mais bon, ma poitrine et mes fesses n'en sont pas encore à pointer le plancher... un jour sûrement... sauf si je succombe à l'appel de M. Silicone.
Mais là n'est pas le sujet hein?
Je viens de passer sur le blog de Patrick et je me demandais ce qui vous avait piqué, vous les brezhoneg. Vous faites tous les 2 à votre manière une ode à la passante ou à l'inconnue.
C'est la saison des amours à Breizhland ou quoi? ;-D C'est le ciel gris et le temps humide qui vous met l'eau à la bouche?
Hihi, je sais qu'il n'y a rien de sérieux dans tout ça. J'y vois juste un talent pour écrire commun à mes 2 blogueurs bretons préférés... avec une préférence pour Papatte. ;-D
Quant à ce fromage maison, je comprends ton bonheur. J'ai fait du paneer il y a peu... c'est magique de transformer les choses. On se sent alchimiste. Et ça ne prend pas autant de temps que ça pour se faire plaisir. Il faut de la patience mais il tellement de choses à faire en attendant que le fromage goutte. Ce n'est pas qu'on est impatient, c'est qu'on ne sait plus tuer le temps.
Triste temps que le notre... je préfèrerai presque vivre à l'époque où on faisait son fromage et où on barattait.
SOUPIR...
Allez, biz... euh... pioupiou je voulais dire.
Alexandra

Anonyme , le 18/11/2008 10:55  

Ca y est, maintenant qu'il est a la campagne, il fait lui-meme son fromage :)

Gracianne , le 18/11/2008 15:08  

et avec des algues fraîches, tu penses que ça fonctionnerai ?
excellente journée ;

Anonyme , le 20/11/2008 09:36  

Ton récit m'a rendu le sourire.

Cécile , le 21/11/2008 23:10  

Et bien, dis donc! Tu as des souvenirs plutôt heu... intéressants! :-) Tant mieux s'ils te rappellent de nous présenter cette petite merveille. Ta version curry, moi je vais la tenter, et t'en redonne des nouvelles.

Anonyme , le 23/11/2008 00:32  

Je t'approuve, le lait et les algues sont les deux mamelles de la Bretagne. Quant au cul de la crémière, c'est pour quand?

Anonyme , le 23/11/2008 09:56  

c'est bon de te relire! meme en noir et blanc ;-)

Claude-Olivier Marti , le 23/11/2008 21:18  

Bon ben y'a plus qu'à goûter ! ... ;o)
Bises
Hélène

Hélène (Cannes) , le 25/11/2008 07:23  

Si on se lance, mieux vaut avec du lait entier frais fermier, non ?

Anonyme , le 26/11/2008 14:26  

Les secrets de la mémoires...quelques stimuli bien placés et nous voilà au pays de Rimbaud !

Anonyme , le 26/11/2008 18:34  

Alors là, ce fantasme sur les gros seins et les grosses fesses de la laitière, ça me laisse sans voix...
Tiens, voilà une idée pour mon surplus de lait à venir (dommage pour le lactarium !!!)
T'as deviné qui c'est ?????

Unknown , le 01/12/2008 15:35